Résultat des courses, tamazight n’est pas encore à l’ordre du jour dans les campus, même si un enseignant-chercheur de l’université présente une émission de contes et de proverbes très suivie à la radio locale. Les enseignants recrutés par l’Education nationale viennent soit de Kabylie ou des Aurès, et le programme unifié proposé aux écoliers n’inclut ni le ouargli ni le righi, et les parents d’élèves de l’école Mohamed Anou ont empêché leurs enfants de passer l’examen trimestriel de tamazight prévu hier en signe de protestation contre l’exclusion de tegargrent, la variante tamazight locale de Ouargla du programme scolaire.
Mehdi Bouamama, président de l’Association des parents d’élèves de cette petite école jouxtant le ksar, s’est dit «offusqué de constater que quatre mois après son lancement officiel, l’enseignement de tamazight à des enfants dont la langue maternelle est tegargrent ait été supplanté par une autre langue qu’ils ne connaissent pas et dont ils sont comptables par des examens et des notes».
Pour ce parent, «nous avons notre propre langue, notre authenticité et nous n’entendons pas l’abandonner ; pourquoi cette unification qui ne prend pas en considération les spécificités locales, au même titre que Ghardaïa, où on enseigne le mozabite, et Tizi Ouzou, où on enseigne le kabyle ?». En attendant de former des enseignants en tegargrent, les parents d’élèves préfèrent reporter l’introduction de tamazight.
Bureaucratie
Du côté de la direction de l’éducation, la réaction est pour le moins déconcertante, soulignant que «les programmes d’enseignement de tamazight sont établis par le ministère de l’Education nationale, qui a unifié le contenu à tout le territoire national». Pour Rabah Riah, «la problématique qui se pose au niveau du ksar est celle de la variante linguistique ouarglie enseignée, mais ce qui nous importe le plus, c’est l’application du programme tracé par l’inspection générale de l’enseignement dans ses moindres détails, nous ne voulons pas rentrer dans cette polémique.»
Interrogé par la radio locale de Ouargla sur sa position vis-à-vis du point de vue exposé par les habitants du ksar, le directeur de l’éducation de Ouargla semblait focaliser son propos sur l’aspect purement administratif, estimant que les «examens ne traiteront que sur le programme enseigné aux élèves et seuls ceux ayant suivi les cours dispensés depuis le début de l’année sont concernés».
La doléance des parents qui ont activement participé l’année dernière à la campagne de recensement et de sensibilisation initiée par l’Association du ksar de Ouargla restera donc lettre morte pour le moment. L’effort avait alors permis de répertorier sept écoles primaires du pourtour de La Casbah de Ouargla, où quelque 280 enfants constituaient la première cohorte d’élèves ciblés par l’introduction progressive de l’enseignement de tamazight dans la région de Ouargla.
Si El Hachemi Assad avait jeté la balle dans le camp de l’université Kasdi Merbah et même orienté un quota d’enseignants de l’Ecole supérieure des enseignants de Ouargla vers les centres de référence de formation des enseignants de tamazight situés à Tizi Ouzou, Béjaïa, Bouira et Batna.
Avant lui, on connaissait «Agerraw n iwalen tegargrent taṛumit», le dictionnaire ouargli/français de Jean Delheure ; à présent, un chercheur autodidacte du cru semble avoir pris à son compte la mission de préparer le terrain. Un an après la publication d’Iwalen s Tegargrent, un mini-dictionnaire arabe-ouargli, paru aux éditions Anzar de Biskra et qui a coïncidé avec le débat autour de l’introduction de l’enseignement du ouargli dans les écoles primaires, Khaled Fertouni, psychologue exerçant à l’hôpital d’El Hadjira, à 100 km de Ouargla, publie Awalna, un ouvrage didactique dédié à l’apprentissage du ouargli aux enfants.