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Des gangsters à l’université

Dans le COUS Bab Ezzouar-Aïn Benian, ces étudiants pris, sans distinction, dans un guet-apens vraisemblablement préparé par des agents censés les servir (selon les témoignages de étudiants eux-mêmes),..

Dans le COUS Bab Ezzouar-Aïn Benian, ces étudiants pris, sans distinction, dans un guet-apens vraisemblablement préparé par des agents censés les servir (selon les témoignages de étudiants eux-mêmes), ont vécu un acte de gangstérisme.

Car, l’université se gangstérise. Par la force de l’omerta installée depuis quelques années, les rapports entre les différentes catégories de la population universitaire se sont chargés de suspicion, de rivalité malsaine, de harcèlement …et de haine. Du haut de la hiérarchie administrative des établissements du supérieur, à celle pédagogique jusqu’au plus bas échelon, chaque catégorie tente de dévaloriser, de décourager et d’humilier l’autre. Et certains «clans» se sont carrément armés de «groupes d’action», généralement des étudiants sans vergogne ou des agents «autorisés», pour faire valoir leurs intérêts.

Et le dernier maillon à subir la charge cumulée n’est autre que l’étudiant, ce bouc émissaire tout désigné pour porter toute cette charge de haine emmagasinée. On le dit fainéant, mal éduqué, agressif et roublard (certainement, il en existe) pour cacher l’incompétence des uns et des autres à créer dans l’enceinte universitaire et ailleurs, ce climat de sérénité qui permettrait l’épanouissement des jeunes apprenants. Qu’un chauffeur de bus et des agents d’université se permettent d’envahir un COUS en pleine autoroute avec des armes blanches, quelles qu’en soient les raisons, est un indicateur fort.

Ces agents, généralement recrutés par des agences de sécurité ou de transport, contractés avec l’établissement universitaire, enhardis et excités par des directives (pour ne pas dire dérapages) autoritaristes des responsables administratifs (recteurs, doyens …), se muent, pour les plus zélés, en harceleurs.

Dénigrant les jeunes étudiants, les encadreurs et même les enseignants qui ne sont pas dans les bonnes grâces du Boss, ces gros bras se permettent tous les excès. Recrutés sans formation en «bonnes manières», ils sont là pour faire régner «l’ordre» : la hantise de tous les recteurs qui, tels des chefs de sûretés sont obsédés par l’aspect sécuritaire au détriment de celui académique. Est-il étonnant alors que cela dérape ?

Pourtant, depuis des années, voire des décennies, des universitaires avertissent, manifestent et se rassemblent sporadiquement pour dénoncer une violence par trop présente. En mai 2010, des universitaires ont rédigé une charte d’éthique et de déontologie pour déterminer les droits et devoirs de chaque catégorie de cette population avec pour trame : le respect. Mais depuis, les événements déplorables s’enchaînent sans vergogne. Des enseignants sont agressés dans l’enceinte universitaire, des étudiants malmenés dans leur quotidien et des responsables interloqués.

Alors que faire ? Organiser une conférence nationale sur les œuvres universitaires pour revoir le cahier des charges des entreprises de prestation de gardiennage, de transport et de nourriture ? Produire une autre charte d’éthique ? Ou continuer à minimiser une situation dont l’ampleur ne peut être cachée ? Pour la première proposition, les résultats «abstraits» de la conférence sur l’évaluation du LMD (dont les recommandations ne sont toujours pas dévoilées depuis plus de deux années), refroidissent l’option. La seconde, ne servirait que de faire-valoir, comme tout texte de loi, pour des règlements de comptes individuels en cas de besoin.

Quant à l’omerta, son résultat est le pourrissement de la situation. Il reste toutefois une option : aller vers les états généraux de l’université. Revoir les critères de désignation des responsables administratifs (recteurs, doyens, secrétaires généraux, chefs de cabinet, etc), mais cela est une autre histoire. Dans les années trente, à Chicago (USA), le gangstérisme porté par le très célèbre Al Capone fut stoppé par l’agent Eliot Ness. Un film d’anthologie y est consacré, dont le titre est sans équivoque : Les incorruptibles. Là est la solution pour l’université algérienne.

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