Absentéisme à l’université, raisons et mesures préventives
Pourtant, si les textes régissant les enseignements dans le système LMD considèrent obligatoire la présence dans les travaux dirigés et les travaux pratiques, ceci n’est pas le cas pour les cours magi..
Pourtant, si les textes régissant les enseignements dans le système LMD considèrent obligatoire la présence dans les travaux dirigés et les travaux pratiques, ceci n’est pas le cas pour les cours magistraux où elle est juste… recommandée ! Et c’est justement, parce qu’il n’y a pas de fiche de présence que bon nombre d’étudiants en profitent pour sécher les cours.
C’est là évidemment une grosse erreur, car les cours servent à apporter les connaissances indispensables en travaux dirigés (TD) et en travaux pratiques (TP). En fait, trois éléments m’amènent à aborder ce sujet.
– D’abord, l’absentéisme aux cours magistraux constitue la cause majeure de l’échec des étudiants à l’université. De ce fait, la lutte contre ce phénomène doit constituer une urgence et une priorité absolue devant mobiliser tous les membres de la communauté universitaire.
– Ensuite, il est évident que les étudiants habitués à bouder les cours durant leur cursus universitaire n’auront pas toutes les compétences nécessaires leur permettant d’avoir de réelles chances de réussite et d’insertion dans le monde du travail.
– Enfin, on constate que d’année en année, ce phénomène s’aggrave et tend à se banaliser. Il y a donc urgence de tirer la sonnette d’alarme et de réfléchir sérieusement sur les causes de l’absentéisme en cours magistraux afin de pouvoir envisager, objectivement, les mesures à même de réconcilier les étudiants avec les bancs des amphithéâtres.
Objectivement, car les solutions existantes, notamment les sanctions et les mesures coercitives sont peu efficaces. Elles ont, au contraire, tendance à favoriser une autre forme d’absentéisme : le présentéisme contemplatif sur lequel, je reviendrai un peu plus loin.
Quelles sont donc les causes de l’absentéisme à l’université ?
Nous sommes tous désemparés face à un bien drôle de comportement que celui des étudiants préférant roder à longueur de journée dans les couloirs et les recoins de la fac, plutôt que d’assister aux cours et nous ne savons pas trop quoi faire. Pourtant, face à n’importe quel problème, le plus judicieux est d’en explorer les causes pour pouvoir envisager des solutions. A priori, on pourrait penser qu’enseignants et étudiants se renvoient la responsabilité. Mais les causes réelles de l’absentéisme universitaire sont plus complexes.
Lorsqu’on interroge les étudiants sur les raisons de leur absence consciente aux cours, nombreux sont ceux qui arguent du fait que les cours académiques soient longs et ennuyeux et que leur présence n’apporte rien de plus par rapport aux supports dont ils disposent. D’autres se plaignent de charges d’enseignement trop lourdes et d’emploi du temps trop chargés. Il est à noter aussi que certains étudiants choisissent les cours en fonction de l’enseignant, de sa maîtrise du cours et de son enthousiasme à transmettre les connaissances.
D’autres par contre avancent des raisons d’ordres social et personnel. Pour s’assurer un semblant d’autonomie financière, ou tout simplement venir en aide à leurs familles, ces étudiants exercent, parallèlement à leurs études, un boulot à temps partiel, en se livrant à des activités souvent aléatoires et, dans bien des cas, à des emplois précaires aux lendemains incertains : simples vendeurs, ou téléopérateurs dans un centre d’appel.
Enfin, y a ceux qui ont tout simplement du mal à se projeter dans l’avenir et s’investir corps et âme dans leurs études faute de modèles, dans leur entourage proche, de quelqu’un, qui, disent-ils, «a fait des études et a réussi» ! Lorsqu’on combine cet état d’esprit avec des difficultés d’apprentissage objectives liées à une mauvaise orientation à l’université ou tout simplement héritées du cycle secondaire, le décrochage est prévisible, voir programmé.
En effet, l’absence aux cours, en particulier chez les nouveaux étudiants, s’explique souvent par des difficultés à suivre un rythme d’apprentissage pour lequel ils sont peu ou pas préparés au lycée. Assistant à ses premiers cours, l’étudiant découvre un grand changement sur le plan des contenus.
L’enseignant tient un langage peu familier, employant un vocabulaire souvent technique qui ne facilite pas sa compréhension. L’encadrement et l’implication du corps enseignant sont beaucoup plus restreints qu’au lycée. Dans son environnement nouveau, l’étudiant découvre, à son corps défendant, un enseignant qui ne lui porte plus le même regard que lui portaient ses enseignants du secondaire.
En outre, la prise de notes comme méthode efficace de mémorisation, constitue pour lui un exercice difficile lors de la transition entre le lycée et l’université. Alors, au lieu de faire un effort personnel qui lui permettra de surmonter cette période d’adaptation, il cède plutôt à la tentation de l’absentéisme. En définitive, les causes de l’absentéisme étudiant sont donc multiples et hétérogènes.
Comment prévenir alors l’absentéisme à l’université ?
Malgré toute l’importance de la formation théorique, le constat est bien là. L’absentéisme aux cours magistraux a atteint un seuil intolérable dans nos universités. Alors faut-il pour autant, rendre les cours obligatoires ? Du moins dans les modules des unités d’enseignement dites fondamentales ? Faut-il instituer l’obligation d’assiduité aux étudiants en 2e cycle de formation (M1 et M2) et en dispenser ceux du 1er cycle (L1, L2 et L3) ?
Ou laisser le caractère obligatoire de la présence de l’étudiant au cours magistral à l’appréciation de l’équipe pédagogique ? Faut-il revoir en profondeur les modalités d’admission et d’orientation des étudiants à l’université ? Faut-il faire de l’obligation d’assiduité une contrepartie du bénéfice des bourses ?
L’expérience a montré que la gestion des absences par la sanction ne conduit qu’à une amélioration fictive de la situation et a plutôt tendance à augmenter le présentéisme passif, et/ou contemplatif. C’est-à- dire que l’étudiant est présent physiquement sans être complètement opérationnel. C’est une forme d’absentéisme, qui en plus des cours théoriques, touche aussi les travaux dirigés.
En revanche, opter pour des stratégies d’évaluation qui prennent en compte les cours théoriques, peut conduire les étudiants absentéistes, sinon à regagner les bancs des amphithéâtres, à apprendre à être autonomes, dès la première année universitaire,en travaillant de façon régulière et efficace en utilisant leurs propres supports pédagogiques.
Ceci d’une part. D’autre part, le tutorat tel que défini et prévu dans les textes régissant les enseignements dans le système LMD (licence, master, doctorat) et dont la concrétisation peine malheureusement à se concrétiser sur le terrain, vise à accompagner l’étudiant durant tout son cursus universitaire.
En tant qu’accompagnateur et confident, le tuteur est bien placé pour rendre confiance à l’étudiant et lui faciliter la transition entre le secondaire et l’université. Une fois la période d’adaptation passée, le tuteur veillera à maintenir et à développer la motivation chez l’étudiant durant toute sa formation.
Ceci étant, il est aussi évident qu’une mauvaise orientation à l’université contribue à accentuer le phénomène de l’absentéisme. De nombreuses incohérences et inadéquations s’observent en effet, entre les filières d’orientation des étudiants et leurs parcours au cycle secondaire. Il est évident qu’une orientation subie ou incompatible avec les résultats pédagogiques de l’étudiant, engendre chez lui une sorte de démotivation qui le conduit droit à l’échec. En revanche, lorsque l’orientation à l’université s’opère de façon convenable, le taux d’échec par manque de motivation ou «manque d’intérêt» est nettement réduit.
Enfin, il est peut-être temps de réexaminer en profondeur le système d’aide financière aux étudiants de manière à venir en aide à ceux qui sont en situation d’indépendance familiale avérée et attestée par une enquête sociale (étudiants mariés, avec famille à charge ou dont la contribution des parents est insignifiante ou n’est pas considérée obligatoire).
Souvent, cette frange d’étudiants est contrainte à déserter les bancs pour exercer une activité connexe. Le niveau d’aide accordé à chaque étudiant doit donc être estimé en fonction de ses besoins et de ses ressources. L’effort de l’Etat pour les étudiants boursiers est conséquent, il doit donc être utilisé à bon escient.
Disons pour conclure que, dès ses premiers pas à l’université, l’étudiant doit prendre conscience de l’importance de l’assiduité dont il doit faire preuve en prévision de son insertion professionnelle future car en milieu professionnel, se discipliner sera une attitude obligatoire à adopter. L’université constitue le cadre idéal pour s’y habituer !